Ce n’est pas que nous ayons peu de temps, c’est que nous en perdons beaucoup.
Sénèque
Je ne sais pas si tu l’as remarqué, mais l’éclat de notre fil doré s’intensifie depuis quelques chapitres. Bien que notre pensée soit encore un peu floue, les choses deviennent passionnantes. On est à des centaines de mètres d’altitude, loin au-dessus de ta cuisine et de mes courriers de refus. Chaque centimètre de laine déroulé nous éclaire davantage, nous tirant ainsi vers le haut.
Et après avoir compris que la libérté se mesurait au prix de ton désaccord, nous avons besoin, tous les deux, d’effleurer les nuages, de nous envoler vers d’autres concepts à comprendre.
Tu commences à cerner mon amour pour l’esprit de synthèse et l’art de dézoomer, alors je te propose d’aborder notre rapport de forces avec le système à l’aide d’un regard neuf…
Si tu y penses deux secondes, le paiement sans contact, le fait de pouvoir acheter en « 1-clic », la lecture automatique sur Netflix (le fameux « regarder encore un épisode »), la livraison de ton repas en un tap… sont autant de petites choses anodines dont les gens raffolent et qui murmurent toutes la même chose :
« Plus facile. Plus vite. Plus sûr. »
C’est comme ça qu’on peut résumer la promesse du système. A bien y réfléchir, les technologies modernes comme les applis, les paiements instantanés ou l’automatisation en règle générale, nous offrent de la fluidité. Cette fluidité est séduisante, car elle supprime les accrocs du quotidien. On obtient alors cette impression douce et sucrée que « tout devient possible en un clic ». Ce rêve est si confortable qu’il endoctrine notre esprit, nous faisant confondre l’accélération avec l’intensité de vivre.
Or, cette fluidité est un piège. Plus nous la subissons et moins on tolère la moindre friction dans nos vies. Que ce soit un retard, un effort, un obstacle, même symbolique… On devient hautement sensibles à la moindre « égratignure » dans nos journées, on se jette sur la moindre facilité. L’envers du décor, c’est donc une société intolérante à la contrariété, à la frustation, à l’imprévu.
Scott Belsky[1] nous alerte à ce sujet, « Moins nous rencontrons de frictions, moins nous devenons résilients, plus nous devenons fragiles. » et il insiste en disant « La friction te fait ressentir… Sans friction, les gens s’engagent de façon insouciante. »
La fluidité nous endort. On oublie que c’est dans la friction qu’on se sent vivre, qu’on construit nos souvenirs, qu’on forge notre résistance.
La fluidité achète notre oubli. En gommant l’attente, elle efface le lieu même du choix. Ce n’est pas moi qui l’invente : les économistes comportementaux comme Thaler et Sunstein ont montré que ce sont les options par défaut — les cases pré-cochées, les chemins sans friction — qui décident pour toi quand tu n’as pas le temps de réfléchir (voir Nudge, 2008).
Les étapes supprimées dans chacun de tes gestes n’économisent pas que des secondes : elles retirent l’instant où tu peux encore dire non — et envisager un autre oui.
De la même manière, la psychologie du paiement nous prouve que lorsque tu dégaines ta carte pour un paiement sans contact, tu ressens moins la « douleur de payer » qu’en sortant des billets. C’est la raison pour laquelle tu dépenses plus.
Du coup, la fluidité n’efface pas que les files d’attente, elle efface aussi les signaux corporels qui freinaient tes excès.
L’OCDE elle-même s’inquiète de ces « coûts de conformité » invisibles qui disparaissent quand tout est numérisé. Plus de fluidité, c’est aussi moins de vigilance.
C’est une tactique gagnante pour la religion du Nouvel Ordre Mondial, puisque plus le système est fluide, plus nos décisions sont automatiques. Daniel Kahneman l’explique bien dans Thinking, Fast and Slow.
Et quand la vitesse devient la norme, la fluidité gomme le moindre temps perdu, mais rabote surtout ta pensée. C’est documenté, quand on « file » plus vite, on pense moins bien.
Tout ça pour te dire que la fluidité n’intensifie pas la vie, elle intensifie simplement la cadence. On confond vitesse et vitalité. On est plus productif mais moins vivant. Or, le fait d’Être n’a rien à voir avec le fait de produire. Tout ça nous parle de notre rapport avec le temps. Avec la mort, également.
Philosophiquement, c’est Heidegger qui avait déjà prévenu : oublier la lenteur, c’est oublier la mort. En supprimant les attentes, les efforts, la durée, le système nous anesthésie du rappel de notre finitude (Être et Temps, 1927).
Les sciences cognitives contemporaines confirment que quand la mort est rendue « saillante » (mortality salience), on trouve refuge dans les structures, les automatismes, les récits simples. C’est précisément ce que te donne la fluidité, un monde sans accrocs, où tu n’as plus à regarder en face ta propre fin inévitable tout en la rendant parfaitement insupportable.
Tout ça pour te dire qu’à l’aide de la fluidité, le système s’évertue à lubrifier ta vie pour baisser le prix de ton « oui » (ton consentement). A contrario, ce même système empile des taxes invisibles sur ton « non » pour le rendre rugueux et douloureux. Lubrifiant d’un côté, verre pilé de l’autre. En toute logique, le choix est vite fait…
Puisque la liberté se mesure au prix du désaccord… la matrice travaille à maximiser ce prix via des frictions, des sanctions, des exclusions pour rendre ton « non » tout simplement impayable.
Si je devais te donner une image simple, je dirais que dans le dernier chapitre, on a vu le prix de ton « non », et tu peux considérer ce prix comme étant le tarif hors taxe (HT).
Ce prix brut, c’est tout simplement le coût du « non » imposé par le système. En clair, ce sont les sanctions et pressions extérieures objectivables (l’exclusion sociale, la perte de revenu, les amendes, le temps perdu, etc.). Bref, c’est le coût de la pression externe mesuré par mon baromètre.
Tu ne fixes pas le montant du prix HT, on te l’impose de l’extérieur. À titre individuel, tu n’as quasiment aucun levier pour l’abolir. Tout ce que tu peux faire… c’est, parfois, le contourner ou le diluer.
Bien sûr, tu peux bricoler un plan B, réduire ta dépendance au système en ayant une réserve de cash, en cultivant ton potager, en rejoignant un réseau parallèle. Mais ne te trompe pas : le système est conçu pour maintenir un prix HT élevé.
Donc, miser uniquement sur l’espoir que « ça baisse de l’extérieur », c’est souvent peine perdue. Surtout si tu es isolé.
En revanche, tu t’en doutes, si je te parle d’un prix brut… c’est parce que le système y ajoute une taxe que tu peux appeler TVA. Cette TVA, c’est ta docilité intérieure. La pression exercée par le système à l’intérieur de toi.
Cette pression agit comme un impôt invisible qui gonfle méchamment la facture. Plus tu es « docile », plus ta « TVA » est élevée. J’espère que cette image est évocatrice.
Si tel est le cas, il nous reste à tirer notre cordon de laine pour explorer ensemble les piliers de notre docilité. Il s’agit d’en comprendre l’origine, le fonctionnement et la manière dont chaque pilier nous fait courber l’échine. Parce que c’est ici que nous allons avoir une marge de manœuvre bien plus grande que sur le prix du « non » HT.
L’obéissance
On tire doucement le fil et on découvre que l’obéissance ne vient pas d’un ordre hurlé, mais d’une vieille tentation imprimée dans nos mémoires : l’envie d’avoir un maître. Remettre le poids de la décision sur d’autres épaules, se délester du vertige de la responsabilité… C’est rassurant.
L’humain est un animal social. Les études en psychologie évolutionniste montrent que les groupes qui survivaient étaient ceux où la hiérarchie était claire, avec un chef, des ordres, une cohésion. Ne pas obéir signifiait souvent être rejeté, donc mourir. Cette empreinte archaïque est encore imprimée en nous. On a un réflexe de soumission quand une autorité claire s’impose.
L’obéissance réduit l’anxiété. Ne pas avoir à décider apaise, parce que choisir engage et culpabilise. Céder, c’est se sentir « du bon côté ».
Des travaux en neurosciences montrent que face à une figure d’autorité, le cortex préfrontal (siège du jugement critique) peut s’inhiber au profit de circuits automatiques d’exécution. C’est un « court-circuit » biologique qui favorise la soumission.
Le Nouvel Ordre Mondial n’a pas forcément besoin de te hurler dessus ou de te cogner. Il brandit simplement l’autorité symbolique via des experts, des uniformes ou des logos institutionnels. L’obéissance fait le reste.
Que ce soit un scientifique, un banquier central, un algorithme prétendu « neutre »… le maître change de visage, mais le réflexe reste le même : si c’est l’autorité qui le dit, je me soumets.
Quel effet a cette TVA sur le prix de ton « non » ?
Si tu es particulièrement docile par réflexe, dire « non » te coûte beaucoup plus cher. Tu ressens la culpabilité de désobéir, la peur d’être puni, la honte d’être dissident.
Ton prix HT (sanctions sociales, économiques, juridiques, etc.) reste le même que celui de ton voisin, mais ta TVA intérieure est énorme. Refuser t’arrache viscéralement, comme si tu brisais un tabou ancestral.
L’obéissance, c’est un peu le sucre rapide de ta peur. Tu n’as plus à penser, plus à choisir… tu t’abandonnes. Mais chaque abandon augmente le prix de ton futur refus. Car plus tu as plié hier, plus ton refus d’aujourd’hui coûte cher. J’espère que ça te paraît clair…
La Peur (sécurité)
Le fil de la peur est tressé au plus profond de notre système nerveux. La peur est l’alerte ancestrale, l’instinct qui nous garde vivants. Mais le système sait pincer ce fil-là comme une corde de violon : une note d’ « urgence » suffit pour qu’on obéisse sans discuter.
La peur a une origine anthropologique. Elle est un outil de survie. Dans la savane, mieux vaut sur-réagir à un bruit dans les buissons que mourir en essayant de rationaliser. Notre cerveau retient plus vite les menaces que les récompenses, on appelle ça le biais évolutif du « négatif », et c’est documenté en psychologie cognitive.
Psychologiquement, la peur active le biais de disponibilité (Tversky & Kahneman, 1973). Plus un danger est médiatisé, plus on le surestime. C’est pourquoi des menaces rares comme le terrorisme ou une pandémie dictent nos comportements plus que des risques quotidiens tels que le tabac ou la pollution.
Physiologiquement, l’amygdale cérébrale déclenche une cascade de stress (adrénaline, cortisol) qui inhibe le cortex préfrontal (zone du raisonnement). En état de peur, on réagit, on n’analyse plus.
Le Nouvel Ordre Mondial joue sur cette corde avec un narratif sécuritaire dans lequel on est toujours plus ou moins « en guerre ». On te parle de « sécurité nationale », d’ « urgence sanitaire », de « protection écologique » ou d’un « ennemi invisible ».
Le système joue également sur la peur via le cadre juridique. On l’a vu et revu en déroulant la pelote, les régimes d’exception s’installent durablement (Patriot Act après 2001, état d’urgence sanitaire après 2020). Bref, c’est une gouvernance par l’alerte et la crainte.
Et bien sûr, la TVA de la peur alourdit salement le prix de ton « non ».
La peur transforme ton refus en acte de trahison. Dire NON à un dispositif présenté comme « protecteur » équivaut à mettre ta vie ou celle des autres en danger.
Tu payes ton refus en culpabilité… « si je refuse, je mets les autres en péril ».
Tu payes en stigmatisation. Tu es pointé du doigt comme un « irresponsable ». Avec l’étiquette « dangereux », « complotiste».
Et enfin, tu payes en isolement social, c’est ton exclusion des espaces publics au nom de la sécurité.
Telle une taxe invisible, la peur majore ton prix du NON comme la surtaxe d’urgence sur une facture.
Le Confort
On tire à présent le fil du confort. Au début, c’est une caresse, une douceur comme choisir l’option la plus simple ou éviter l’effort inutile. Puis, à force de tirer, on réalise que ce fil est devenu une corde : une perfusion douce dont tu ne peux plus te passer.
Depuis toujours, l’humain cherche à économiser son énergie. Dans un monde de rareté, choisir la facilité était une stratégie de survie. Notre cerveau est câblé pour éviter l’effort. On préfère marcher plutôt que de courir, il est plus facile de copier plutôt que de réinventer.
L’humain est doté d’une paresse fonctionnelle. On valorise ce qui est facile, et ce qui est facile nous paraît juste. C’est le biais de confort cognitif.
On est physiologiquement sensible à la récompense immédiate. Chaque geste fluide (payer sans contact, livraison en un clic, chauffage constant…) libère de la dopamine. Comme une drogue douce, ça abaisse notre tolérance à l’attente, à l’effort, à la lenteur.
En deux générations, on a désappris la pénibilité qui structurait nos vies. On a gommé l’effort de cultiver, de réparer ou même de patienter. Le confort est devenu notre norme physiologique et psychique. Hier encore l’eau chaude et la lumière à volonté étaient un luxe. Aujourd’hui c’est un droit implicite. Regarde à quel point une coupure de Wi-Fi, un embouteillage ou trop de monde en caisse peut te taper sur les nerfs. Ça me rappelle cette fameuse citation de G. Michael Hopf :
« Les temps difficiles créent des hommes forts, les hommes forts créent des temps faciles, les temps faciles créent des hommes faibles, et les hommes faibles créent des temps difficiles. »
La matrice n’a pas besoin de barreaux. Elle se contente de conditionner nos commodités, Thaler et Sunstein appellent ça le « nudge ». C’est-à-dire, que par d’habiles « coups de pouce » (nudges), l’État devient ainsi l’architecte de nos choix (choice architect), chargé de créer un environnement incitant, à notre insu, à obéir comme il le souhaite.
Comme on l’a vu, il suffit de supprimer « la friction » (paiement sans contact, appli unique, wallet universel) pour y parvenir.
Et quand tout passe par le même tuyau (numérique, bancaire, énergétique), refuser revient à s’exclure de la vie ordinaire. Ta dépendance est induite.
La TVA du confort fait donc grimper méchamment la facture de ton refus puisque tu payes en temps avec de la paperasse, des files d’attente, des bricolages alternatifs.
Tu payes aussi en stigmate social. On t’étiquette comme « archaïque » parce que tu veux encore du cash, ou « asocial » parce que tu refuses d’utiliser la dernière appli tendance.
Et, au bout du compte, tu payes en impuissance. Parce que quand tu ne sais plus faire sans la machine, chaque panne ou refus devient un gouffre.
En résumé, le confort est une prison capitonnée. On y dort bien, mais le jour où tu veux sortir, le prix du NON devient carrément insoutenable. Plus tu es addict à ton confort, plus le coût de ta liberté est faramineux… C’est aussi simple que ça.
La paresse
Le fil de la paresse ressemble d’abord à une douce excuse, du genre « à quoi bon ? ». C’est un fil mou, confortable, qui promet repos et tranquillité. Mais à force de tirer, on voit qu’il se change en liane qui nous retient et nous ligote. Plus on suit ce fil, plus on perd notre puissance d’agir.
La paresse n’est pas un vice isolé, c’est, à l’origine, une économie de survie. Dans un environnement hostile, gaspiller inutilement son énergie pouvait tuer. La « loi du moindre effort » est donc inscrite dans nos circuits neuronaux.
Ce qui veut dire que notre cerveau choisit systématiquement la solution la plus simple, même quand elle est sous-optimale. Merci le biais du moindre effort.
Pour couronner le tout, l’inactivité prolongée renforce… l’envie de rien foutre. Des études montrent que la sédentarité altère la motivation et la capacité de projection.
La religion du Nouvel Ordre Mondial surfe à fond sur cette inertie. Le système n’a pas besoin d’interdire ton refus, il sait que tu ne bougeras pas.
Et pour être sûr que tu aies la flemme de t’opposer au système, il mise sur l’automatisation. Moins tu en fais, plus tu délègues. C’est le rôle de l’assistant vocal, de l’IA, des services clés en main.
Et afin d’être absolument certain que tu restes paresseux, il joue sur la déresponsabilisation. Quand tout est prévu, optimisé, livré, l’énergie qu’il te faut pour protester est herculéenne.
La TVA de la paresse rend alors ton refus hors de prix.
Tu payes cher en inertie, tu voudrais dire NON, mais l’effort de le faire paraît colossal.
Tu payes aussi en procrastination. Tu repousses ton refus, jusqu’à ce qu’il soit trop tard.
Et tu payes la note en abandon. Tu soupires, puis tu signes, tu coches, tu acceptes, juste parce que c’est plus simple que de résister.
La paresse te retient mollement, jusqu’à ce que tu ne bouges plus. Ton NON coûte très cher parce que tu n’as plus la force de le prononcer.
La lâcheté
On tire le fil de la lâcheté… et il se dérobe aussitôt. Ce n’est pas un fil tendu, mais une ficelle toute molle. Le choix de la sécurité du troupeau plutôt que le risque de la solitude. C’est souvent un silence, une tête baissée, un pas de côté pour éviter l’affrontement.
Depuis la nuit des temps, s’opposer au groupe équivalait à la mort. L’instinct de survie privilégie l’alignement. On doit rester dans la masse, même si elle a tort. La lâcheté est donc un mécanisme tribal : mieux vaut se taire que d’être rejeté.
La dissonance cognitive (Festinger, 1957) explique que pour réduire l’angoisse du conflit, on préfère rationaliser l’obéissance plutôt que risquer la confrontation.
Pour ne rien arranger, le stress du conflit active l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien. En termes clairs, le corps préfère l’évitement, car l’adrénaline et le cortisol te fatiguent vite.
Le système sait qu’il suffit de placer chaque individu devant le dilemme suivant : affronter seul ou céder avec le troupeau. Il génère en toi la spirale du silence.
Et pour s’en assurer, il utilise un narratif dominant. « Si tu refuses, tu bloques, tu ralentis, tu nuis aux autres ».
Enfin, le système mise sur la carte de l’isolement ciblé. Celui qui résiste est montré du doigt, présenté comme une menace pour la cohésion.
La TVA de la lâcheté rend la facture salée car tu payes en silence. Tu n’oses pas dire NON publiquement, donc tu ravales ce refus qui te rendrait plus libre.
Tu payes en honte, également. Tu sais que tu te renies, mais tu choisis pourtant la tranquillité.
Enfin, et c’est peut-être le plus dur… tu payes en soumission consentie. Tu restes dans la cage, non par ignorance, mais par peur d’en sortir seul.
La lâcheté est une sacrée TVA morale. Chaque fois que tu ravales ton refus, tu t’endettes intérieurement. Tu sauves ta peau aujourd’hui, mais tu perds ton âme demain.
La conformité
Quand on tire sur le fil de la conformité, il s’effiloche en mille regards braqués sur toi. Ce n’est pas la loi qui te soumet, mais plutôt le regard des autres. Le fil invisible de la tribu, tissé de sourires, d’étiquettes et de silences, pèse souvent plus lourd qu’une chaîne de fer.
L’être humain est avant tout un animal social. Survivre dans la préhistoire, c’était chasser ensemble, dormir ensemble, se protéger ensemble. L’exclusion du groupe signifiait souvent la mort. Notre cerveau a donc intégré la peur panique de l’ostracisme comme un réflexe de survie.
L’expérience d’Asch (1951) démontre que face à un groupe unanime, 75 % des individus plient leurs jugements, même quand la réponse est manifestement fausse. La conformité est donc un réflexe automatique de cohésion.
L’exclusion sociale active les mêmes circuits neuronaux que la douleur physique. La peur d’être rejeté fait littéralement mal.
Le Nouvel Ordre Mondial le sait et il manie la preuve sociale à la perfection pour te persuader. Le système active le levier des foules : « tout le monde le fait, pourquoi pas toi ? »
Il brandit aussi le badge de la conformité. Sous la forme d’un QR code, d’un certificat, d’un label… l’objet n’est pas technique, il est social. Parce qu’il revient à prouver qu’on fait partie du groupe.
La TVA de la conformité pèse donc lourd. Très lourd. Ton refus devient une mise à l’écart immédiate. Ça se paye en stigmate, via l’étiquette de « complotiste », « égoïste », etc…
Ça se paye aussi en isolement, avec moins d’invitations, le silence des collègues et l’exclusion discrète.
Ça se paye surtout en inquiétude intérieure. C’est la fameuse impression d’être seul contre tous.
Tu vois que la conformité est un fil social plus fort que l’acier. Tu ne peux pas dire « non » parce que tu crains d’être exclus. Mais à force de céder pour rester « avec tout le monde », tu découvres que ta cage n’a pas de barreaux… elle est faite de regards.
Le besoin de narratif simple
Le fil du narratif n’est pas fait de laine fine mais de punchlines grossières. Trois mots-totems suffisent pour tricoter une couverture rassurante : « sécurité », « santé », « écologie ». C’est chaud, ça rassure tout de suite. Mais c’est aussi une camisole cognitive.
Le cerveau humain déteste l’incertitude. Depuis toujours, les mythes, les récits fondateurs et les religions ont permis de donner du sens au chaos. On cherche des histoires simples pour apaiser l’angoisse d’un monde trop complexe.
Au niveau psychique, on souffre du biais de simplicité. On préfère une explication courte, claire et fausse, à une explication longue, nuancée et vraie. C’est le piège de l’heuristique de disponibilité.
Au niveau physiologique, les récits activent le système limbique. Le cerveau « raconteur » sécrète de la dopamine et de l’ocytocine, renforçant l’attachement à l’histoire et à ceux qui la partagent.
Le Nouvel Ordre Mondial use du narratif simple comme d’un anesthésiant collectif. Il dégaine sans cesse les totems de sécurité, d’urgence, de santé publique, de planète en danger.
Il use et abuse de la répétition. Le système martèle des slogans courts et omniprésents, comme des mantras.
Or, refuser le slogan dominant, c’est refuser la tribu qui le répète, et ça peut coûter très cher. Voilà pourquoi la TVA du narratif simple alourdit la note.
Tu payes en marginalisation. On te colle l’étiquette de « négationniste », d’« anti-science », de « climato-sceptique ».
Tu payes en incompréhension. Ton « non » nuancé paraît illisible face aux punchlines répétées mille fois.
Tu payes en épuisement. Devoir expliquer patiemment 10 lignes d’argumentation contre un seul mot-totem rabâché en boucle est un combat perdu d’avance.
C’est la raison pour laquelle le narratif simple étrangle l’esprit critique. Dire « non » à un slogan de la pensée dominante, c’est comme parler prose au milieu des cris… ton prix monte, car ta vérité nécessite des phrases longues là où la cage se contente d’un mot.
La déresponsabilisation
Si tu tires sur le fil de la déresponsabilisation, tu découvres qu’il se déroule comme une paperasse infinie. Ce n’est pas un fil de laine, c’est plutôt un formulaire préimprimé. C’est le fameux « je ne fais qu’appliquer la procédure ». Tu signes en bas, tu coches la bonne case, et tu respires : la faute n’est plus à toi.
On le sait, anthropologiquement, prendre une décision engage la responsabilité et donc la peur du blâme. Depuis toujours, les groupes humains externalisent la faute vers un chef, un rituel, un dieu. C’est un mécanisme archaïque par lequel on délègue le fardeau du choix pour ne pas porter la culpabilité.
C’est le célèbre « effet Milgram » : quand une figure d’autorité prend la responsabilité, les individus obéissent plus facilement, persuadés que la faute n’est pas la leur.
Des études en neurosciences montrent que le sentiment de contrôle de ses actes (agency) diminue fortement lorsqu’on « exécute un ordre ». Le cortex préfrontal responsable du jugement moral s’inhibe. Même (et surtout) quand tu portes un uniforme…
Les élites ont compris l’art du disclaimer[2]. Il suffit de transferer la responsabilité sur les procédures. « c’est l’algorithme qui décide », « la machine a refusé », « c’est la loi, je n’y peux rien ».
Et quand ça ne suffit pas, on reporte la responsabilité via la délégation. Chaque agent devient un rouage qui n’assume rien, mais qui fait tourner la machine.
Tout ceci explique que la TVA de la déresponsabilisation pèse fatalement sur le prix de ton « non ». Parce que dire NON dans un monde où chacun se cache derrière un règlement, c’est devenir le grain de sable qui fait grincer la chaîne.
Tu payes en culpabilité inversée. Ce n’est pas le système qui t’écrase, c’est toi qui es accusé de bloquer les choses.
Tu payes en friction sociale. Personne ne veut « assumer » ton refus.
Tu payes en isolement moral. Car tu portes seul un poids que les autres ont déposé aux pieds de l’autorité.
Au bout du compte, la déresponsabilisation est une TVA sournoise. Elle dilue la faute dans la procédure, mais concentre le coût sur celui qui ose dire NON. Dans une foule d’innocents exécutants, le dissident paye pour tous.
La Fatigue
Le fil de la fatigue, lui, est effiloché et plein de nœuds. C’est une corde usée qui casse au moindre effort. Quand le corps est épuisé et que l’esprit est saturé, il n’y a plus d’élan pour dire « non ». On signe, on clique, on se soumet… juste pour que ça s’arrête.
L’humain a toujours dû gérer son énergie. Dans la nature, l’épuisement signifiait la mort : courir trop longtemps après une proie ou fuir un prédateur épuisait les chances de survie. La fatigue est donc une alarme biologique pour forcer l’arrêt.
On le sait, c’est documenté, la fatigue réduit la volonté. Des études sur l’ « épuisement de l’ego » montrent que plus on enchaîne des décisions, plus on cède à la solution la plus facile.
Le manque de sommeil altère le cortex préfrontal (jugement, inhibition) et amplifie l’amygdale (émotions, réactions). La fatigue entraîne donc moins de discernement, plus d’impulsivité.
Les architectes du N.O.M savent très bien que l’usure est plus efficace que la répression. Et c’est très facile à mettre en place dans une société de flux constants. Il suffit de notifications non-stop, de deadlines à la pelle, d’injonctions contradictoires pour favoriser ta surcharge attentionnelle.
Histoire d’être sûr que ton esprit sature, ils ajoutent de la paperasse sans fin. Des formulaires, des mises à jour, des codes à renouveler.
Et dans ce monde ultra-connecté, ta disponibilité 24/7 t’achève. Il n’y a plus de frontière entre ton travail, ta vie privée et tes obligations.
La TVA de ta fatigue coûte alors excessivement cher. Dire « non » exige beaucoup trop d’énergie. Or, quand tu es vidé par cette société de la fatigue, tu payes en résignation. Alors, tu acceptes par lassitude.
Tu payes aussi en erreurs : tu cliques sur « oui » pour en finir, même si tu n’es pas d’accord.
Sans parler du coût biologique lié à l’épuisement de ton corps. Le manque de sommeil entraîne un affaiblissement immunitaire, un dérèglement hormonal et des risques cardio-vasculaires.
La fatigue augmente massivement le risque d’accident de la route, dans des proportions comparables à l’alcoolémie. Donc, si ton « non » t’épuise (parce que tu dois remplir dix fois plus de démarches, chercher des alternatives ou gérer tes angoisses), tu mets ton corps en dette, et cette dette se paie en santé, voire en vie.
Tu payes, bien sûr, en soumission silencieuse à chaque fois que tu n’as plus la force de contester. Donc tu t’exécutes.
Tu payes aussi en manque de discernement. La fatigue affecte le cortex préfrontal, responsable de l’analyse et de l’inhibition. Tu deviens plus impulsif, tu choisis les solutions les plus faciles, parfois dangereuses.
Ecrasé par la fatigue, tu ne repères plus les signaux faibles, tu laisses passer les failles, tu prends de mauvaises décisions professionnelles, financières, médicales, personnelles… ou politiques. Ton « non » peut se retourner contre toi. Trop fatigué, tu ne tiens pas ton refus jusqu’au bout, ou tu choisis une alternative pire que la cage elle-même.
Tu l’as compris, la fatigue est peut-être la TVA la plus vicieuse. Le système t’use jusqu’à ce que ton « non » coûte plus cher que ton sommeil.
L’Amnésie
Le fil de l’amnésie est étrange. Tu tires dessus et il s’efface entre tes doigts. C’est une mémoire effilochée. Chaque génération oublie un geste, une recette, un outil. Peu à peu, le tricot du savoir-faire se défait, maille après maille. Et quand il faut dire « non » au système, on réalise qu’on ne sait plus vivre sans la machine, sans l’État, sans le réseau.
La transmission orale et pratique a toujours été la clé de la survie. Savoir chasser, réparer, cultiver, soigner sont autant de fils tressés dans la mémoire collective. Mais nos sociétés modernes ont externalisé ces compétences dans des institutions et des technologies. Le résultat, c’est que l’oubli devient structurel.
Sur le plan psychique, le confort cognitif nous pousse à déléguer aux machines (GPS, cloud, applis). L’usage répétitif d’outils de substitution entraîne l’ « effet Google » : on retient moins l’information quand on sait qu’elle est stockée ailleurs. Concrètement, c’est ce qui explique qu’on ne mémorise plus les numéros de téléphone de nos proches.
Sur le plan physiologique, moins un geste est répété, plus les circuits neuronaux s’affaiblissent. C’est le principe de plasticité. L’oubli devient alors un effacement réel du cerveau et du corps.
Tu vois, le Nouvel Ordre Mondial n’a pas besoin de confisquer les savoir-faire, il suffit de les rendre obsolètes.
Comment ? Par l’externalisation totale dans un premier temps. Plus personne ne mémorise ses trajets, ses recettes de base, ses numéros comme je te l’ai dit.
Par les services clés en main, dans un second temps. pourquoi apprendre à réparer, cuisiner, jardiner, quand tout est livré en 24h ?
Mais aussi par un cadenas technologique. Avec une dépendance au numérique ainsi qu’aux infrastructures centralisées.
La TVA de l’amnésie fait exploser la facture du refus. Parce que tu payes en impuissance. Tu ne sais plus comment faire autrement.
Tu payes aussi en dépendance. Refuser un service revient alors à perdre une capacité vitale.
Enfin, tu payes en peur. C’est l’angoisse d’être incapable de survivre hors du système.
Plus tu oublies les gestes, plus le prix de ton « non » devient impayable. Car quand tout s’efface en toi, chaque refus équivaut à une mise à mort.
Le regard des autres
Quand on tire sur le fil éclatant du regard des autres, on voit le cordon qui flatte l’ego. Ce fil nous donne l’illusion d’exister parce qu’on est vu, validé, applaudi. Or, ce fil brillant devient vite une laisse : plus tu vis à travers les regards, plus tu crains le jour où ils se détourneront de ton image. C’est d’une logique implacable.
Depuis la préhistoire, le statut dans le groupe conditionnait l’accès aux ressources, aux alliances, à la reproduction. Être admiré, c’était donc survivre. Le besoin d’estime sociale est devenu un moteur psychologique fondamental.
Le biais de comparaison sociale (Festinger, 1954) nous pousse à nous évaluer en fonction des autres. Plus l’écart est grand, plus on ressent de la jalousie, de la honte ou de la fierté. Et on ressent ça très tôt, dès l’école, avec des notes sur 20 et des moyennes de classes.
Les « likes », les applaudissements et les félicitations déclenchent de la dopamine. Les neurosciences confirment que la validation sociale active le même circuit de récompense que les drogues.
Le système alimente la cage de verre par la gamification et la visibilité publique. Il se sert de scores et de métriques comme la quantité de followers, les notes Uber, les badges verts ou des QR codes valides.
Le système entretient un phrénomène de vitrine permanente à l’aide des réseaux sociaux comme vitrine de conformité.
Le regard des autres est une TVA qui plombe clairement le prix de ton « non ». Quand ton identité est branchée au regard d’autrui, tu payes la note de plusieurs façons.
Tu payes en stigmatisation, puisqu’un seul NON t’expose au bashing, au « name & shame ».
Tu payes en perte de statut, puisque moins de « points » dans la tribu équivaut à moins d’accès aux opportunités.
Tu payes en auto-censure : puisque tu t’interdis le refus par peur de briser ton image publique.
Tu crois que le regard des autres t’élève, mais en fait il t’attache. Plus ton statut dépend d’applaudissements, plus ton « non » coûte cher en solitude.
L’Individualisme & l’Égoïsme
On tire sur le fil de l’individualisme… et on s’aperçoit qu’il n’est pas tissé de laine, mais de fibres coupées. Chaque brin vit pour lui, sans trame commune. Ça brille d’autonomie, mais ça casse au premier choc. Car sans filet collectif, chaque « non » devient un saut sans parachute.
Historiquement, les communautés assuraient la survie. C’était le rôle du clan, du village ou de la guilde. Mais la modernité occidentale a glorifié l’individu autonome, séparé. Tocqueville décrivait déjà ce repli sur le cercle privé comme un danger : chacun s’occupe de lui, délaissant la chose commune.
Le biais d’auto-focalisation conduit chacun à surestimer son importance et à négliger les interdépendances. Ça rejoint d’une certaine manière le syndrome du personnage principal dans le film de ta vie.
Pour ne rien arranger, cette forme de narcissisme induit un isolement social qui augmente le cortisol (hormone du stress) et réduit l’espérance de vie. C’est la preuve biologique que l’humain n’est pas fait pour l’isolement.
Tu t’en doutes, le Nouvel Ordre Mondial prospère sur l’atomisation, parce que nous réduire à la plus petite unité sociale possible est une aubaine. Il t’offre des interfaces impersonnelles, comme la livraison sans contact, les applis remplaçant les interactions, le travail à distance permanent.
Il te sert une logique consumériste individuelle à toutes les sauces : « à chacun sa bulle », chacun ses droits, chacun son écran.
Le système sait qu’un individu seul est plus docile parce qu’il n’a personne pour l’épauler dans son refus. Tu deviens alors plus dépendant de l’État, du marché, des infrastructures techniques. Plus contrôlable puisque ses données sont isolées, sa trajectoire devient prédictible.
Le Nouvel Ordre Mondial excelle dans la fracturation organisée des collectifs. Il éclate la famille, affaiblie par la mobilité géographique, la précarité, la logique de consommation individualisée (chacun son écran, chacun son compte).
Il pulvérise joyeusement les communautés locales. Elles sont remplacées par des services centralisé. C’est l’ubérisation systématique.
Il fracasse le cercle intergénérationnel. Tu vois bien la rupture de la transmission. Les grands-parents transmettaient le savoir-faire, des récits, une mémoire… aujourd’hui, on délègue ça à l’école ou aux écrans. Et à moins d’être aveugle, difficile de ne pas constaster au quotidien le vide intersidéral qui sépare les jeunes et les vieux.
Le système casse les groupes professionnels ou syndicaux. Une fois affaiblis, fragmentés, ils sont remplacés par la contractualisation individuelle.
Le résultat recherché, c’est l’isolement maximal : l’individu réduit à une unité économique, sociale et administrative. Seul face à l’État, seul face à la machine, seul face au marché. Mais aussi seul face au reste du monde. Seul face à une équipe d’architectes organisés et motivés. Tu deviens donc une proie idéale. Hannah Arendt l’écrivait dès 1951 dans Les origines du totalitarisme : « l’atomisation des individus est une condition du totalitarisme. »
Du coup, la TVA de l’individualisme alourdit forcément ton « non ». Quand tu es seul, chaque refus pèse cent fois plus lourd.
Tu payes en risque augmenté. Tu n’as aucun filet social pour amortir ton exclusion.
Tu payes en solitude. Il n’y a aucun groupe complice pour partager le poids de ton refus.
Tu payes en docilité contrainte. Tu acceptes parce que tu n’as personne sur qui compter.
Le chacun pour soi paraît être une liberté glorifiée sur les réseaux en mode selfie, mais c’est une illusion. Seul dans ta bulle, ton « non » coûte le prix d’un gouffre.
Le Mythe du progrès
On tire le fil du progrès… et il scintille comme une promesse sans fin. Toujours plus vite, toujours plus haut, toujours mieux. Mais à force de le dérouler, on s’aperçoit que ce fil ne mène nulle part parce qu’il tourne en rond.
Le progrès est devenu un mythe messianique, demain corrigera l’humain, le futur sauvera la planète, l’avenir effacera tes limites. Et dire « non » à ce récit, c’est passer pour un hérétique.
Les sociétés humaines ont toujours cherché un horizon d’espérance, que ce soit à travers les religions, les mythes ou les utopies. La modernité occidentale a remplacé le salut divin par le salut technique : la science et la machine sont les nouveaux dieux.
Le mythe du progrès se nourrit de notre biais d’optimisme, à chaque fois qu’on croit que demain sera forcément meilleur qu’hier. Ce biais nous pousse à accepter n’importe quelle contrainte présente pour une promesse future.
Au niveau physiologique, la dopamine du « prochain » (prochain modèle, prochaine version, prochaine sortie) entretient un cycle d’attente et de récompense similaire à celui des drogues et des jeux de hasard.
C’est donc en parfaite connaissance de cause que le Nouvel Ordre Mondial recycle le mythe du progrès sous la forme d’une roadmap infinie.
Il dégaine le fameux narratif techno-solutionniste où chaque crise appelle une innovation. La religion du N.O.M. fait appel à un messianisme séculier qui consiste à dire « encore un effort, encore une contrainte, demain la technologie résoudra tout ».
Mais on a tiré assez de laine pour savoir qu’il n’en n’est rien. La TVA du mythe du progrès pèse excessivement lourd.
Dans un monde hypnotisé par l’avenir, refuser une innovation revient à payer en stigmatisation : tu es taxé de réactionnaire, de passéiste.
Ça revient à payer en exclusion. Le progrès devient obligatoire (e-ID, appli, wallet), du coup… refuser, c’est rester sur le quai.
Ça revient à payer en culpabilité. Car on te fait croire que ton NON bloque « l’avenir de l’humanité ».
Au final, le mythe du progrès t’attache à demain pour mieux t’enchaîner aujourd’hui. Dire « non » au futur promis, c’est payer le prix d’être traité comme un vestige du passé. Un arriéré.
La hantise de mourir
On se rend compte en tirant sur ce fil qu’il te plonge dans le noir. Derrière toutes nos soumissions, il y a cette peur brute… Celle de finir, de disparaître, de ne plus être.
Chaque confort, chaque sécurité, chaque promesse de progrès n’est qu’un pansement posé sur cette plaie originelle : la conscience de notre mortalité.
D’ailleurs, la conscience de la mort est peut-être ce qui distingue l’humain. Ernest Becker parlait du « déni de la mort » comme un moteur des civilisations. Au fond, nous bâtissons des religions, des empires, des idéologies pour ignorer ou éviter l’inévitabilité de la mort.
La Terror Management Theory (Greenberg, Pyszczynski & Solomon, 1986) démontre que la peur de la mort pousse les individus à se conformer aux normes culturelles et à obéir aux autorités qui promettent protection.
La perception d’une menace existentielle (pandémie, guerre, catastrophe climatique) active les circuits de stress profond, renforçant l’adhésion aux récits sécuritaires.
Le Nouvel Ordre Mondial brandit la mort comme un épouvantail pour te vendre la survie.
Côté santé, il te dit « sans injection, tu risques ta vie ». Côté sécurité, « sans surveillance, tu risques l’attentat ». Côté écologie, « sans quotas carbone, la planète meurt et toi avec ».
Tu vois, chaque narratif place l’individu devant le choix : obéir ou mourir. Lorsque ton « non » est cadré comme un danger mortel, tu passes trois fois à la caisse.
Tu payes en culpabilité existentielle. Ton NON serait une mise en danger des autres.
Tu payes en soumission préventive. Parce que tu obéis avant même qu’on t’y force, pour éviter l’idée de ta propre fin.
Et tu payes en perte de liberté intérieure : vivre devient prolonger sa survie au lieu d’habiter sa vie.
La hantise de mourir est LA TVA fondamentale. Elle augmente le prix de chaque « NON » et elle le rend si cher que tu réfléchis à deux fois, parce qu’elle transforme ton refus en menace mortelle. Mais c’est aussi le fil d’or car l’individu qui apprivoise sa finitude retrouve une liberté invincible. Mais j’explorerai cet axe par la suite.
Le coût de sortie
On tire le dernier fil… et on découvre qu’il n’est pas fait d’une seule fibre, mais de tous les autres noués ensemble. Obéissance, peur, confort, paresse, fatigue, amnésie, regard social, isolement, mythe du progrès, hantise de mourir : autant de fils qui, pris séparément, semblent fragiles… mais qui tressés ensemble forment une corde si lourde que personne n’ose la couper. C’est le coût intérieur réel de ton « non ».
Quitter le groupe, la norme, le récit dominant, c’était risquer la mort sociale — et souvent la mort tout court. L’excommunication ou l’exil étaient parmi les sanctions les plus dures des sociétés anciennes. Cet héritage est encore inscrit dans nos circuits neuronaux, ce qui veut dire que la sortie est toujours vécue comme une menace vitale.
Sur le plan psychique, chaque pilier ajoute sa propre taxe.
Ainsi, la peur impacte la culpabilité. Le confort touche à la dépendance. Le regard des autres agit sur la honte. La fatigue force la résignation, etc.
Additionnées, ces charges créent un biais de statu quo : il paraît toujours moins coûteux de rester dans le système que de tenter d’en sortir.
Le stress chronique lié à l’idée de rupture, comme perdre un emploi, un statut, un réseau ou un revenu, active ton cortisol. Ce qui réduit ta capacité de prise de risque. En clair, ton corps devient complice de ta soumission.
On garde en tête que le Nouvel Ordre Mondial ne verrouille pas seulement l’entrée de la cage, il rend la sortie trop beaucoup trop chère avec les 6 cadenas qui composent le « prix brut (HT) » de ton « non ». Tu te souviens du chapitre précédent ?
Je te rappelle que la pression sociale, économique, sanitaire, juridique, numérique et tout le temps que ton refus te ferait perdre constituent le prix du « non » hors taxe. C’est ce que te coûte la liberté, d’entrée de jeu. Le tarif universel pour tout le monde, si tu préfères.
Le prix brut (HT), c’est donc la sanction extérieure : la suspension, l’amende, l’exclusion, tout ce qui accroche et qui rend la vie « moins fluide ».
Mais ce n’est jamais ce chiffre seul qui détermine si tu es en mesure de « payer » ton refus – et donc de t’affranchir du système. C’est-à-dire devenir libre.
Le vrai montant, c’est le prix TTC : ton coût de sortie réellement ressenti. Il additionne la facture objective et la TVA de tes docilités intérieures (l’obéissance, la peur, le confort, la paresse, etc.).
Prix TTC = Prix du NON HT (pression extérieure) + TVA (docilité intérieure)
La TVA, ta docilité intérieure, représente donc la pression interne que ton refus engendre. C’est-à-dire, ce que tu ajoutes toi-même à la facture à travers tes piliers de docilité (peur, confort, fatigue, dépendance, etc.) pour devenir libre.
Il est facile à comprendre que la TVA de chaque pilier de docilité dépend de la constitution intérieure de chacun. En conséquence, le montant de la taxe est directement liée à ton propre parcours.
Deux personnes peuvent dire le même « NON » dans la même situation et ne pas du tout payer le même prix…
Ce qui étrangle A peut sembler léger pour B. Pas parce que B est plus fort moralement, mais parce qu’il souffre moins d’un pilier particulier (par ex. il a appris à vivre sans confort, ou il se fiche du regard des autres).
C’est ta docilité globale qui détermine combien tu vas effectivement payer. C’est elle qui fixe le prix TTC de ta liberté. Ton coût de sortie total est égal à ce que tu ressens et à ce que tu dois effectivement assumer pour rester fidèle à ton « non ».
Tu vois que notre pensée s’affute. On commence à comprendre que la véritable liberté ne vient pas de la rébellion aveugle, mais de la capacité à se libérer des chaînes intérieures. Comme le disait Jean-Jacques Rousseau :
«L’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite est la liberté. »
Dans le prochain chapitre, on s’envole donc un peu plus haut et je t’explique comment on fait vraiment baisser le prix de ton « non ».
Mieux encore, je vais t’expliquer comment tu peux le payer à tous les coups. Autrement dit, je vais te donner les clés pour que tu t’offres les moyens de sortir du système sans souffrir…
[1] Cofondateur de Behance, ancien directeur produits Adobe, vice-président exécutif du Creative Cloud, associé général du fonds d’investissement en capital-risque Benchmark.
[2]
Clause de non-responsabilité les moyens de baisser la facture dans les prochains chapitres. Je te tends ce nouveau fil d’or en te rappelant que moins le « non » te coûte, plus tu es libre…
