La liberté confisquée : Chapitre 18

L
Tous les textes-médecine sont disponibles aux formats livre papier et ebook

On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve.

Héraclite

À ce stade de notre pelote, on touche presque les étoiles. Tu considères peut-être que nous avons un recul suffisant pour croiser le fer avec le Nouvel Ordre Mondial : ce n’est pas encore tout à fait exact. Suspendus à notre fil, on s’est hissé déjà très haut, c’est vrai… mais ce n’est pas terminé.

Je te propose ici de nous rappeler qu’on a tendance à trop souvent confondre le système actuel avec la Vie. La Vie obéit à d’autres lois, elle s’auto-organise et elle se relie.

On s’éloigne un peu du duel stérile « moi contre le système » pour aborder ta liberté d’un point de vue ontogénétique. Et pour la première fois dans cette pelote, je vais nous faire changer de taille. On va retrécir si fort que chaque fibre de notre fil de laine va devenir immense. Nous voilà à une échelle microscopique, posés sur un câble doré, épais comme une autoroute.

La surface n’est pas lisse, elle est faite d’écailles imbriquées. Et au milieu des cuticules de la laine, certaines zones brillent comme des nappes calmes.

Cette fois, je ne te demande pas de tirer sur le fil, mais de marcher avec moi dans ce paysage laineux où l’électricité statique dresse les peluches en hérisson pendant que je t’explique la suite…

Même si tu as l’impression d’être secoué de crises en crises, d’être propulsé à toute vitesse dans un monde coloré et bruyant qui va trop vite… Tu n’es pas une boule de flipper.

Tu es une cellule vivante prise dans un tissu, un organe bien plus vaste. Ta liberté ne vient pas dans le fait de pouvoir t’éjecter hors du corps. Ta liberté consiste à redevenir une cellule saine, autonome et reliée. Et si le tissu dans lequel tu baignes est pathologique, ta libérté consiste à proliférer des ilots sains qui refont un organe fonctionnel. En clair, une cellule libre ne « fait pas ce qu’elle veut », elle se crée de l’espace en modulant ses contraintes.

Une cellule n’est pas un caillou, elle fabrique ses propres frontières, via sa membrane. Elle échange avec l’extérieur, c’est le métabolisme. Elle se régule, on appelle ça l’homeostasie et l’allostasie. Et quand il le faut… elle s’efface (apoptose) pour que l’ensemble grandisse de la manière la plus juste possible. De ce point de vue la liberté est une danse réglée qui invente, ajuste, et relie.

Le métabolisme, lui, consiste à transformer. Vivre, c’est donc convertir des flux en forme. Tout circule. Et tant que ça circule, tu tiens debout. Quand ça stagne, tu te figes et tu deviens docile par défaut.

L’ordre émerge par le flux, pas contre lui. (Prigogine : structures dissipatives.) En tant que cellule, tu existes en dépensant — de l’attention, du glucose, du temps — pour donner forme. Ta liberté augmente quand tu sais transformer tes entrées (infos, peurs, ressources) en œuvre, pas quand tu t’ankyloses.

Ça veut dire que la liberté est un courant, pas un entrepôt. Tu n’es pas libre parce que tu « as » beaucoup d’infos ou beaucoup de ressources, mais parce que tu les transmutes vite en formes utiles : que ce soit un texte, une règle, un prototype, une décision. En clair, tu es libre à travers ta créativité adaptative. Du coup, accumuler sans transformer, c’est l’équivalent biologique d’un œdème : ça gonfle, ça n’agit pas. (Et c’est douloureux).

Ça veut aussi dire que ton identité devient une fonction de production. « Qui je suis » se traduit par la manière stable dont tu transformes la peur, la contrainte, le hasard en quelque chose qui a du sens, en un outil, ou en soin. Moins tu transformes, plus tu subis. Plus tu transformes, plus ta signature se précise. Tu trouves « ta place ».

Un organisme vivant libre n’évite pas les secousses, il convertit les chocs en apprentissages et en règles. Chaque coup porté au système digestif de ton projet permet de l’améliorer.

Tout ça nous pousse à considérer la décision comme l’art de dissiper l’entropie. Chaque choix qui réduit ton incertitude (et crée une trace) te libère.

Dans cette perspective, la membrane remplace ta carapace. Te blinder t’isole. Une carapace bloque et enferme. Une membrane choisit ce qu’elle fait entrer et sortir. J’aime profondément cette nuance.

La carpace nie le monde, alors que la membrane dialogue avec lui. Elle trie, module, repousse ou décale. De ce point de vue, la bonne question n’est plus « comment je dis non à tout ?», mais « qu’est-ce que je laisse entrer, à quel débit, sous quel format — et en quoi je le transorme ? ». C’est ce qu’on appelle métaboliser…

Si on pousse le raisonnement et le parallèle entre toi et la cellule un peu plus loin… La « constance » du milieu dans lequel tu baignes est un équilibre dynamique : c’est l’homeostasie. Sous pression, cet équilibre devient allostasie — l’art d’ajuster la consigne pour tenir dans un monde changeant. Si on transpose à notre situation, ça veut dire que la docilité te fige ; la liberté te re-paramètre.

Donc, « être libre » revient à savoir re-configurer ton système en temps réel. Ce n’est pas juste « tenir bon », mais changer les réglages (tes seuils, tes gains, tes priorités, tes horizons) pour continuer à bien fonctionner quand le monde bouge et secoue.

Ça veut dire que tu ne changes pas de boussole,  ton courage, ta vérité, ta dignité restent intacts. Tu changes d’itinéraire quand le terrain se transforme et devient impraticable. La docilité inverse ça : elle sacralise l’itinéraire (procédure) et sacrifie le cap à tenir.

Je tiens à être très clair, « re-paramétrer » ce n’est pas te renier. Si les changements et les réglages te rapprochent de ce qui n’est pas négociable en toi (valeurs, cap), c’est de l’adaptation. En revanche, si tu t’en éloignes, c’est de la compromission.

Tirons sur ce fil encore un peu pour aborder l’apoptose. Car en tant que cellule, tu as aussi besoin d’éclaircir pour grandir. Le vivant sait programmer la fin de ce qui n’a plus sa place pour préserver l’ensemble. Tu n’es pas libre tant que tu ne sais pas « laisser mourir » un rôle, un outil, un récit, un automatisme. C’est à la fois chirurgical et très fécond.

Ta liberté « ontogénétique » se traduit tout simplement par ta capacité d’adaptation créative sous contraintes. C’est ajuster tes règles, transformer ce qui t’arrive en quelque chose d’utile, tout en restant fidèle à ce qui compte pour toi.

« La nécessité est mère d’invention. » La contrainte est généralement un aiguillon : elle force le réel à accoucher d’une forme nouvelle. Très souvent, l’invention humaine naît d’un manque, d’un danger, d’un coût, d’une pénibilité. L’Histoire en regorge.

La machine à vapeur est née du besoin de pomper l’eau des mines inondées (contrainte industrielle). La pasteurisation et les vaccins découlent du besoin d’endiguer des épidémies meurtrières (contrainte sanitaire).

Internet et les protocoles TCP-IP sont nés du besoin de maintenir des communications résilientes en cas d’attaque (contrainte stratégique).

Le GPS est le fruit d’un besoin de guidage précis pour l’armée et l’aviation (contrainte opérationnelle).

Les prothèses, les fauteuils, et les rampes sont des réponses pour compenser des limitations motrices (contrainte d’accessibilité).

On pourrait allonger la liste, mais tout tient dans une idée : l’humain porte en lui un moteur de transmutation.

Si on garde nos valeurs non négociables comme un cap à tenir, si on apprend vite en toute circonstance, et si on s’appuie sur un cercle de confiance, alors la contrainte devient un carburant.

Dans ces conditions, il émerge presque toujours quelque chose de meilleur — parfois minuscule, parfois décisif. La période actuelle est dangereuse, donc féconde, à condition de la métaboliser.

C’est un peu la réponse à l’art d’exploiter les crises de nos chères élites. Une réponse positive, spontannée, à ta façon.

Fort de cette compréhension, je te propose à présent de nous rendre notre taille initiale de manière à ce que je puisse te tendre un nouveau fil et dézoomer encore un peu.

Si tu veux gagner en liberté, il nous faut comprendre le design de contrôle qui se met en place. A travers toute la première partie de cette pelote, on a vu que trois couches convergeaient dangereusement.

Le Nouvel Ordre Mondial cherche à tout capter, tout tracer, c’est la datafication du vivant. Cette religion prône une gouvernance algorithmique, c’est-à-dire qu’elle cherche à réguler par les modèles, les notes, les filtres et les coupures automatiques. Enfin, la cathédrale du N.O.M. s’appuie sur des rails financiers et identitaires numériques, les fameuses identités et paiements programmables.

C’est loin d’être un délire de complotiste, ce sont des trajectoires officiellement assumées, sous couvert d’efficacité, de sécurité, et d’inclusion (lol).

Le moteur psychologique de ce design, c’est la peur. On module ta docilité en agitant des pertes. Que ce soit des pertes de revenus, de statuts, de soins, de liens, de temps. C’est l’économie comportementale appliquée au quotidien. On surestime ce qu’on risque de perdre, et on cède pour éviter le manque, l’ennui, la panne, la honte.

Mais au-delà de la peur qu’on nous vend, qui est un moteur de docilité… il y a également celle des élites. Et la peur des élites est un moteur de contrôle.

Là-haut, on redoute affreusement l’imprévisible. Ils ont peur des cygnes noirs[1], des foules ingouvernables, de la panique financière, de la contagion sociale. D’où la datafication intégrale, l’obsession du « temps réel » et les tableaux de bord partout.

Les élites craignent la perte de légitimité. Par exemple, un narratif qui déraille, une défiance, des « vérités concurrentes ».

En réponse ils tiennent à centraliser la parole, certifier les sources, classer et masquer le bruit. D’où la modération algorithmiquement étendue, la hiérarchisation des contenus, la chasse au « non-vérifié », ou encore la censure qui rampe.

Ils ont peur du risque systémique, peur du défaut de coordination, peur de la responsabilité juridique, peur du manque… peur de tout. Peur de nous.

C’est rationnel à leur hauteur, toxique à la nôtre. Alors ils bâtissent des structures qui nous enferment et ils nous vendent la peur des pertes pour qu’on reste sur la « bonne voie ». Leur peur fabrique la cage, la nôtre l’habite.

OK. Maintenant, je te propose de regarder tout ceci dans le reflet d’un miroir pour nous permettre de penser à l’envers.

À la peur, on ne répond pas par une peur « plus forte », mais par l’Amour. Attention, quand je te parle d’Amour, ce n’est pas du sentimentalisme, en mode bisounours, mais vouloir le Vrai Bien. Le Bien de soi, des siens, du lieu.

La peur sert d’alarme, pas de gouvernail. Elle rétrécit le champ, elle contracte, elle dit « attention ». Point, barre. Si tu lui donnes le volant, elle te conduit toujours au même endroit. Vers plus de contrôle, moins d’options, avec des dégâts collatéraux.

L’Amour dans le sens de la sollicitude, du soin, de la loyauté au vivant, joue un autre rôle. Il ouvre. Il augmente les options. Il protège ce qui mérite de l’être et il crée ce qui manque. Ce n’est pas de la guimauve, c’est l’énergie qui oriente.

Regarde la dynamique… La peur appelle la peur. Tu mets de la méfiance, tu récoltes de la méfiance. Et on part dans une escalade.

L’Amour casse la boucle, au contraire. Tu poses des signaux de sécurité, la tension baisse, les fonctions hautes reviennent comme penser, parler et coopérer. Ce sont deux circuits différents, strictement opposés. Le second neutralise l’emballement du premier.

« Et face à un prédateur ? » l’amour n’exclut pas la force, il l’ordonne. On neutralise pour protéger, puis on répare. La peur brute veut punir pour se calmer, alors que l’Amour veut préserver la Vie et rendre le monde habitable demain. La nuance décisive.

Sous la peur, tout se rétrécit, c’est vrai pour la parole, la confiance, les horizons. Sous l’Amour, tout s’ouvre de façon responsable, que ce soient les infos fiables, la coopération réelle, ou les limites claires. Le bon indicateur n’est pas « qui crie le plus fort », mais « qu’est-ce qui augmente la sécurité sans détruire ce qu’on protège ? ».

La peur informe, elle nomme précisément la menace. L’Amour oriente, il protège les innocents, relie les forces et créer la solution. Il procède avec des « non » qui ne sont pas négociables et une justice qui répare.

L’amour redistribue les cartes : quand tu t’aimes réellement, toi, les tiens et la Nature… ce qui compte vraiment ne se vend plus, donc le chantage perd sa matière. Concrètement, l’amour s’incarne en vérité (je nomme), en courage (je fais ce qui est juste), en confiance (à des personnes, pas à des promesses).

Toujours dans le reflet du miroir on voir que face aux algorithmes qui veulent tout prévoir, on peut remettre le jugement humain sur le devant de la scène. Pourquoi ?

Parce qu’un algorithme optimise un proxy, pas le Bien. Il calcule vite sur des données passées et des critères figés. Du coup, il ne voit ni l’exception juste, ni la nuance qui sauve.

Le jugement humain, lui, sait changer de règle quand la règle écrase, c’est la différence entre équité et égalité. Il sait pondérer des valeurs en conflit comme la sécurité, la dignité et la liberté. Et il est capable d’assumer une décision devant quelqu’un, avec des raisons, pas seulement un score.

L’algo déraille dès que le cas est rare, nouveau ou ambigu. Au contraire, l’humain peut contextualiser, interroger la source, suspendre pour mieux instruire. L’idée, c’est donc de prendre le temps quand il le faut, de traiter au cas par cas, de discuter vraiment.

Par-dessus tout, avec un jugement humain on peut discuter, corriger, réparer. Il n’y a pas de société légitime sans décisions explicables, contestables, révisables.

Le logiciel algorithmique peut pré-classer à grande échelle, mais au point de contact, l’humain doit décider. La vitesse de l’informatique est appréciable pour filtrer, la lenteur est de rigueur quand c’est humainement coûteux. C’est le seul ordre qui respecte les personnes.

Face aux systèmes d’identité et d’argent programmables, on cultive ce qui n’a pas de prix : le don, les biens communs, la présence, la sobriété.

Car cultiver ce qui n’a pas de prix ne « remplace » pas tout, mais ça délégitime et désamorce la dépendance- programmable. Tu desserres l’étau par deux mouvements simples, en réduisant la part programmable de ta vie, et en augmentant les options hors-système. C’est discret, mais stratégique.

Face aux notes et aux scores, on préfère le témoignage humain. Une réputation vécue vaut mieux qu’un chiffre.

Un score compresse le réel pour optimiser un objectif. Un témoignage signé raconte le contexte, les motifs et la trajectoire. Il est donc plus juste et contestable qu’un chiffre qui écrase.

Quand des gens racontent ce que tu as vraiment fait, ou acceptent de parler en ta faveur, c’est bien plus difficile à truquer qu’un simple score. Ça permet aussi de montrer ce qui est unique dans chaque situation.

Ce qui veut dire que quand tu réduis le levier des plateformes utilisant un score, tu fais grimper forcément leur coût de contrôle.

Bref, au contrôle qui achète par la peur, on répond par des biens in-mesurables et in-négociables, comme l’amour, la vérité, le courage, la confiance, le don, les communs, la présence, l’intuition… Là, l’algorithme n’a plus de prise et la finance n’a plus d’objet.

À ce point précis, la stratégie s’arrête. Il ne s’agit plus de gagner contre la machine, mais de devenir inachetable. C’est là que s’ouvre la liberté sous un angle « mystique ».

La liberté mystique ne me promet rien. Elle ne me protège pas. Elle ne négocie pas. Elle se place « au-dessus » pour te rendre disponible.

Ici, on ne cherche pas une assurance tous risques, ni un deal gagnant-perdant avec le monde. Cette liberté-là est une disponibilité intérieure : tu peux faire ce qui est juste, même sans avoir la moindre garantie quant à l’issue.

Bien entendu, il ne faut pas  confondre ce concept avec la passivité (« je subis »). Je te donne un exemple, tu dis une vérité délicate à un proche sans savoir comment il réagira. Tu ne « négocies » pas l’Amour contre la paix apparente… tu restes « disponible » à la relation et à ce qu’elle va devenir.

Quand je te parle d’« Amour », ce n’est pas la guimauve romancée, c’est celui qui t’empêche d’avoir un prix. En effet, certaines choses « n’ont pas de prix » : c’est le cœur de la dignité selon Kant et des limites morales des marchés d’après Sandel.

Ce que tu aimes vraiment ne se troque pas contre du confort ou des avantages. C’est un peu le liant de toutes tes valeurs cardinales. Alors, le chantage devient ridicule comme un filet jeté sur la mer.

On a vu tous les deux que le système veut tout mesurer. On peut presque entendre le clic des compteurs qui capturent le temps, les gestes, les consentements, les petites redditions.

Et si la sortie n’était pas de casser le compteur, mais de devenir inmesurable là où ça compte ? Plutôt que de lutter frontalement contre chaque mesure, je te propose de déplacer ton centre vers des choses non mesurables comme la présence, la conscience, le regard que tu portes ou le don.

En effet, le don, la bienveillance, notre humanité, ça se mesure très mal et ça ne s’attrape pas. Les élites peuvent les simuler, jamais les posséder.

D’ailleurs, on peut se demander si « être libre » n’est pas simplement cesser d’être possédé ? Par la peur, par l’image de soi, par l’idée d’avoir raison ? De ce point de vue, être libre, c’est sortir des crochets qui nous agrippent. C’est se déconditionner.

Nos jours sont tricotés de conditionnements  familiaux, scolaires, médiatiques et même algorithmiques. Des « cases » qui nous apprennent quoi craindre, quoi désirer, comment paraître. À force de répétitions, ces scripts parlent à notre place, on réagit au lieu de décider.

Sortir des crochets, c’est d’abord voir le crochet. De côté-là, on commence à être affûtés. C’est aussi mettre un nom sur la peur, repérer le réflexe de prestige, sentir la compulsion à gagner l’argument et vouloir toujours avoir raison.

Or, tu n’es ni tes peurs, ni tes avatars, ni tes opinions du jour. Tout ce qu’on t’a appris à l’école est soit faux, soit biaisé. Ce sont juste des programmes qui tournent en toi.

La liberté, c’est d’abord parvenir à se désidentifier de ces programmes : « ceci m’habite, mais ce n’est pas moi ». À partir de là, tu peux reconfigurer quelque chose en toi avec moins de réflexe et plus de présence. Moins de posture automatique, et plus de vrais choix. C’est modeste, pourtant c’est décisif.

Alors, quelque chose en toi s’allège, et ta main s’ouvre à nouveau. Ton poing était serré brutalement pour se défendre. Maintenant, ta paume ouverte exprime la fermeté sans crispation. C’est ta force tranquille avec une frontière claire. Tu peux dire « non » sans haine, et « oui » sans être servile. Tu n’as plus besoin de « gagner » ce rapport de force avec le système.

Bien sûr, la pression exercée par le Nouvel Ordre Mondial te pèse, parfois elle t’écrase, parfois elle va même jusqu’à te tailler. Et quand elle te taille, tu peux voir apparaître une plaie que tu n’avais pas vue. Mais, peut-être que la liberté, c’est de laisser la cicatrice se montrer — et de ne pas plaquer un vernis tout de suite. Ne cherche pas à maquiller l’épreuve trop vite, il est bon de laisser le réel révéler l’essentiel.

Et l’essentiel, c’est quoi ?

C’est de pouvoir garder un regard tendre quand on te parle durement, une vision large quand on cherche à t’imposer des œillères. C’est de pouvoir dire ou écrire ce qui est vrai sans trembler. C’est de pouvoir faire un pas en arrière quand tu réalises que tu es en train de vendre ton âme au diable. Ces trois gestes de rien du tout suffisent à rester aligné avec cet « Amour ».

Tu l’as compris, l’Amour, ici, c’est ce qui reclasse tes priorités. Quand il est aux commandes, le statut et le confort passent après. Ce qui reste vraiment important remonte à la surface : ce sont les personnes, une parole vraie, le fait d’être réellement là, ici et maintenant, en conscience.

Vue sous cet angle, la liberté n’est pas le fait d’avoir « mille choix ». C’est ouvrir la seule porte qui ne claque pas, celle de la présence.

La présence ?

La présence c’est le fait d’être là, entier. C’est prêter attention, intentionnellement, au moment présent, sans jugement. C’est le contraire de ruminer le passé, de fantasmer le futur, de jouer un rôle, de chercher à plaire ou de s’enivrer pour fuir.

La présence, c’est ton corps posé, l’esprit net, le cœur ouvert. Tu vois ce qui est, tu dis les choses sans tricher, tu écoutes sans écran, tu choisis un geste juste — maintenant.

La présence est la clé de cette liberté. Quand elle baisse ou s’évanouit, le pilote automatique prend la main : on replonge dans les routines, les réflexes, les scripts sociaux. On redevient prévisible — donc mesurable, donc achetable.

Au contraire, quand notre présence monte et augmente, l’œil s’ouvre : on a l’esprit critique, le libre arbitre, le rappel instantané de nos valeurs cardinales.

Être présent, c’est donc voir ce qui est, appeler un chat « un chat » sans tricher, et choisir un geste juste, aligné, maintenant.

Le système prospère sur ton inattention, la présence la lui retire. Elle ne suffit pas sans boussole ni règles de vie, mais sans elle, ta boussole ne sert strictement à rien.

En clair, ta présence éveille ta lucidité, elle permet des choix, et fonde la liberté. Au contraire, ton absence installe le mode zombie matrixé, rend tes attitudes prévisibles et livre ta vie au contrôle par la donnée. Et ce qui tombe bien, c’est que je vais avoir besoin de toute ta présence pour tirer sur le fil doré de l’avant-dernier chapitre. Car on se hisse dans les tous derniers étages de notre raisonnement…


[1] « Black swans » (en français : cygnes noirs) sont des événements très rares, imprévisibles par les modèles habituels, avec un impact énorme, que l’on rationalise après coup (« c’était évident ! ») — concept popularisé par Nassim Nicholas Taleb.


0 0 votes
Évaluation de l'article

Rester en lien

Si ce murmure a résonné en toi,
et que tu veux rester relié aux prochains textes-médecine,
je t’invite à rejoindre la lettre de ceux qui chercher à se guérir, à grandir, à bâtir et à transmettre.

Elle voyage lentement, au rythme du cœur,
et apporte ce qui doit être semé.

A propos de l'auteur

Matthieu Biasotto

Auteur indépendant toulousain, rêveur compulsif et accro au café. J'écris du thriller, du suspense avec une touche existentielle.

S’abonner
Notification pour

0 Commentaires
Le plus récent
Le plus ancien Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
N'hésite pas à m'aider dès maintenant à construire le monde de demain : me soutenir ❤️

Articles récents

Commentaires récents

0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x
0
    0
    Ton Panier
    Ton panier est videRetour boutique