Faida – Chapitre 98

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Dans la gueule du loup

giulia

La mère de Gianni reste immobile, ses yeux perçants me transpercent, comme si elle pouvait lire en moi. Sa présence domine la pièce, aspirant l’air lui-même, son aura étouffe toute tentative de fuite. Son visage figé dans une expression glaciale masque une tempête d’émotions. Ses traits restent impassibles, mais ses yeux brûlent d’une colère contenue, un jugement implacable qui me glace jusqu’au cœur. L’odeur des roses fanées flotte dans l’air lourd, rendant chaque respiration laborieuse. Cette maison semble imprégnée des secrets qui la hantent.

Je me sens piégée. Le magnétophone que je tiens semble peser une tonne, porteur d’une vérité à la fois libératrice et destructrice pour Gianni. Cet enregistreur, si petit, est désormais une bombe prête à exploser, et je frissonne face à ce qu’il pourrait révéler.

— Pour la dernière fois : qu’est-ce que vous fichez ici ?

Le regard de la mère de Gianni ne faiblit pas. Le silence est lourd, chaque seconde passée sous son regard est une épreuve. Mon cœur bat à tout rompre. Je puise dans l’amour que je ressens pour Gianni, mais cette femme incarne tout ce qui menace de nous détruire. Elle scrute mes moindres pensées, cherchant à déceler mes faiblesses.

Je serre le magnétophone, comme si cet objet fragile pouvait me protéger. Les souvenirs de Gianni et moi, de notre bonheur passé, semblent si loin, déformés par les trahisons et l’ombre de Massimo. Face à cette femme, mes convictions vacillent.

— Je… je devais vérifier quelque chose… C’est pour Gianni.

Ma voix se brise, mais prononcer son nom me redonne un peu de force. J’essaie de me tenir droite, mais son regard me cloue sur place. Elle fait un pas en avant, et son ombre s’étend encore, me submergeant. Mon cœur se serre.

— Pour Gianni ?

Sa voix est douce, mais avec une pointe glaciale qui blesse. Le mépris dans son ton est glacial.

— Tu te mêles de choses qui ne te regardent pas, Giulia.

Son tutoiement me rabaisse. Ses mots me frappent, m’excluant, me reléguant au rôle d’étrangère, d’intruse. Mes mains tremblent, le doute s’installe. Suis-je en train de plonger dans une histoire qui me dépasse ? Est-ce que je mets Gianni en danger ?

Je respire profondément, rassemblant mon courage. Mon corps est secoué par l’adrénaline, mais il n’est plus temps de reculer.

— Si, justement, ça me concerne.

Ma voix vacille, mais je me force à la rendre plus ferme.

— Des hommes de Massimo m’ont tiré dessus. Gianni est en danger. Si je ne fais rien, il pourrait tout perdre.

Mes mots, bien que tremblants, portent la vérité. Mais elle reste de marbre, impassible. Un rire sec et froid s’échappe de ses lèvres.

— Tu es plus naïve que je ne le pensais.

Son ton est venimeux.

— Tu crois vraiment que tu peux affronter Massimo et t’en sortir indemne ?

La dure réalité s’abat sur moi. Elle connaît son beau-frère mieux que quiconque. Le danger est bien réel, menaçant Gianni et moi. Je devrais reculer, mais une flamme de révolte s’allume en moi.

— Peut-être que je ne peux pas, mais je préfère échouer en essayant que de rester là à ne rien faire.

Je ne sais pas d’où vient cette force, mais elle brûle en moi. Je me tiens droite, prête à défier tout ce qu’elle représente. Cette fois, mes mots sont fermes. Je me bats pour ce que j’aime, et rien ne pourra m’arrêter.

Le silence qui suit mes paroles semble transformer l’atmosphère. La mère de Gianni me fixe, une lueur de surprise traverse ses yeux, mais elle disparaît rapidement, remplacée par une expression sombre, calculatrice.

— Tu crois connaître Gianni ?

Sa voix est plus sournoise, presque serpentine.

— Gianni est aussi perdu que toi dans tout ça. Tu penses vraiment que fouiner dans les affaires des Rossi te sauvera ?

Ses paroles sont des lames, cherchant à détruire mes certitudes. Elle veut instiller le doute, et pendant un instant, elle y parvient. Le froid du doute s’infiltre, mais je m’accroche à une chose : Gianni. Je ne peux pas abandonner.

— Peut-être… En tout cas, je ne peux pas le laisser affronter tout ça seul.

Son regard se pose à nouveau sur moi, et le silence devient oppressant. Elle m’observe, ses pensées dissimulées derrière un masque impénétrable.

— Je vois que tu es déterminée. Mais sache une chose, Giulia : la vérité que tu cherches… elle n’apportera que destruction. Pour toi, pour Gianni, pour tous ceux qui y toucheront.

Ses mots résonnent, lourds de menaces voilées. Au fond de moi, je le sais déjà. Cette vérité est un danger, prête à tout emporter. Mais je dois l’affronter, pour Gianni, pour nous. Il est trop tard pour reculer. Je préfère embrasser la destruction que de rester dans l’ignorance.

 

Gianni

Assis sur le lit, mon cœur bat si fort que chaque pulsation résonne dans mes tempes, comme un compte à rebours infernal. Chaque seconde s’étire dans cette chambre d’hôpital sombre et silencieuse. Les bips des machines, autrefois anodins, sont devenus des rappels cruels : vivant, mais impuissant. À quoi bon être encore en vie si je ne peux pas protéger Giulia ? Si je la perds, tout ça n’aura servi à rien.

Mon regard se fixe sur le corps inerte de l’homme de main de Massimo, étendu à mes pieds. La seringue plantée dans son cou n’a pas délivré toute sa charge, et je remarque, presque par réflexe, la légère élévation de sa poitrine. Un souffle faible, une respiration à peine audible. Pris dans le feu de l’action, je n’ai pas pensé à tout vider. Peut-être que c’est mieux ainsi. Il est hors d’état de nuire, mais toujours en vie, à la frontière de la conscience.

Aucune culpabilité ne monte en moi. C’était lui ou moi. S’il faut me salir les mains pour sauver Giulia, je le ferai sans hésitation. La froideur de l’acier, la sensation d’avoir frôlé le dernier souffle de cet homme… tout semble irréel, comme un cauchemar dont je ne peux m’échapper. Je me rends compte que je ne suis plus l’homme que j’étais. Mais je n’ai pas le luxe de flancher. Giulia compte sur moi, et je suis prêt à me perdre dans les ténèbres pour elle.

Mes mains tremblent encore, mélange d’adrénaline et de choc. La douleur lancinante dans mes côtes me rappelle que je suis vulnérable. Pourtant, elle me ramène au présent. Je me penche pour fouiller les poches de l’homme. Mes gestes sont mécaniques, détachés, comme si je n’étais qu’un spectateur. Un trousseau de clés, un couteau. Le froid du métal dans ma main me ramène à la réalité : cet homme n’était pas venu me menacer, il était venu m’éliminer.

Massimo n’hésitera pas. Si je tombe, Giulia sera seule face à cette menace, et cette pensée me terrifie plus que tout.

Je pense à elle, à son sourire, à la douceur de sa voix. Chaque souvenir de nous, heureux et loin de tout ça, semble s’éloigner, remplacé par l’ombre du danger. Je prends le téléphone de l’homme et, les doigts tremblants, compose rapidement un message à Giulia.

« Tu en sécurité ? Tu as pu ouvrir coffre ? »

Le silence qui suit l’envoi est insupportable. Aucune réponse. Où est-elle ? Chaque seconde sans nouvelle est une torture. L’angoisse monte, et je serre les clés dans ma paume, la morsure du métal me ramenant à la réalité. Je dois la retrouver.

Je me lève avec peine, chaque mouvement déclenchant une nouvelle vague de douleur dans mes côtes. Rester ici serait signer ma condamnation, et Giulia est dehors, seule, en danger. Elle a besoin de moi.

Je me traîne jusqu’au parking de l’hôpital, chaque pas m’arrachant un grognement. Le froid nocturne m’attaque dès que je mets le pied dehors, les rafales de vent pénétrant jusqu’à mes os. Une voiture noire m’attend comme une promesse de fuite. Je m’apprête à la déverrouiller, luttant contre la douleur qui m’empêche de respirer correctement. Les clignotants déchirent la nuit.  Le froid me garde lucide : Giulia est là-bas, quelque part, en danger.

Je ferme les yeux un instant, tentant de calmer les battements furieux de mon cœur. Mais un craquement dans l’obscurité me fige. Ce bruit sec résonne dans les ténèbres, lourd de menace. Puis, une voix familière déchire le silence.

— Gianni ! Bouge pas une oreille, enfoiré !

Mon cœur s’arrête. Je me retourne brusquement, chaque muscle tendu. Ma main glisse vers le couteau dans ma poche, prêt à me défendre. Mais cette voix… je la reconnais. Je m’immobilise, ma main relâchant doucement le manche du couteau.

Le frère de Giulia, se tient devant moi. Ses yeux, animés d’une fureur dévorante, me transpercent. La lumière de la lune projette des ombres acérées sur son visage, chaque ligne de son corps tendue, prête à exploser. Il est une tempête sur le point de déferler, et la haine qui émane de lui est palpable. Cette confrontation était inévitable.

— Ezio…

J’ai la très nette impression que les choses vont se compliquer.

Si cette histoire te plaît, partage-la avec ceux que tu aimes ! Ensemble, faisons voyager ce roman.

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A propos de l'auteur

Matthieu Biasotto

Auteur indépendant toulousain, rêveur compulsif et accro au café. J'écris du thriller, du suspense avec une touche existentielle.

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