Parfum d’évasion
gianni
Le cuir sous mes doigts craque à peine, un murmure discret, absorbé par le ronronnement du moteur. Je sens la légère résistance du volant, chaque couture du cuir effleurant mes paumes. Le temps d’une respiration, je ferme les yeux, essayant de chasser l’image des sous-vêtements de Giulia, abandonnés au sol, qui s’impose à moi. Son absence laisse une empreinte profonde que mon désir suit obstinément. Elle est presque tangible, comme si elle s’était glissée dans les plis de ma chemise, m’enveloppant tout entier. Je rouvre les yeux et vérifie l’heure. Aujourd’hui marque un tournant. Giulia m’attend. L’idée de la retrouver accélère les battements de mon cœur. Cette journée doit être parfaite. Rien d’autre ne compte.
L’air frais du matin soulève une fine brume au-dessus des docks. Ma voiture noire se fond dans le paysage, aussi discrète qu’un fauve prêt à bondir. Je l’aperçois enfin. Définitivement, la beauté la plus foudroyante est celle qui surprend. Elle a troqué sa tenue habituelle, cette chemise simple et usée, pour une robe légère qui capte chaque rayon de soleil, épousant avec grâce ses courbes sculptées par le travail en mer. Je reste sans voix. Ses longs cheveux bruns, ébouriffés par le vent, captent la lumière douce. Elle fixe l’horizon, absorbée dans ses pensées. Les pêcheurs sont déjà partis, laissant une baie tranquille, baignée de lueur dorée. Giulia se tourne vers moi, et en un instant, avec un sourire éclatant, elle lance le signal de notre escapade.
Je descends de la voiture, nos regards se croisent. Une étincelle naît. Son léger sourire allume en moi une chaleur inattendue. Je la prends dans mes bras, et notre étreinte promet des moments intenses pour le week-end à venir. Sous mes doigts, je ressens ses courbes fermes, modelées par les années en mer, mais je perçois aussi une fragilité qu’elle dévoile rarement.
— Tu as l’air épuisé, Gianni. Je lui souris pour apaiser ses inquiétudes, ma main glissant doucement le long de son dos, sentant la chaleur de sa peau à travers le tissu léger de sa robe.
— J’ai passé beaucoup de temps à organiser ce petit week-end.
Je charge ses bagages dans le coffre, captant son regard curieux sur la Maserati. Ses yeux, d’un magnifique noisette doré, pétillent d’une curiosité mal dissimulée. Elle plisse légèrement les paupières en observant la voiture.
— C’est une Quattroporte, non ? Elle fait bien dans les… 530 chevaux, si je ne me trompe pas.
Surpris par la précision, je hoche la tête.
— Transmission auto à huit rapports, ça doit envoyer pas mal dans les virages…
Je n’aurais jamais imaginé qu’elle en sache autant sur le sujet.
— D’où sort cette beauté ? Elle me dit quelque chose…
Son ton, à la fois direct et espiègle, me fait sourire.
— Elle ne sort que pour les grandes occasions. Et tu es une grande occasion.
Flattée, elle sourit, mais cette lueur de malice, si typique chez elle, brille dans ses yeux. Ce mélange de douceur et de force, capable de désarmer d’un seul regard.
— Une grande occasion, hein ? Alors, où vas-tu ranger le mât ? Pas sur la banquette en cuir, j’espère ? Je doute qu’il y ait une attache-remorque sur cette Maserati.
Je ris en imaginant la scène d’un mât de plusieurs tonnes tracté par ma bagnole.
— Fais-moi confiance pour la logistique. J’ai tout prévu.
Son sourire s’élargit, une lueur d’anticipation dans ses yeux. Avant de démarrer, je jette un dernier coup d’œil autour de nous. Dès que j’appuie sur l’accélérateur, la Maserati s’élance, projetant nos soucis loin derrière.
Escortés par l’aube, on longe la côte, le vent s’engouffrant dans l’habitacle. Je jette un coup d’œil à Giulia. Ses cheveux dansent légèrement sous la brise. Ses yeux, fixés sur l’horizon, brillent d’une intensité tranquille, comme si elle se laissait totalement porter par l’instant. L’air salé s’entremêle à son parfum naturel, presque sauvage, qui évoque chaque moment partagé avec elle.
À chaque virage, je sens un poids se libérer. Loin des contraintes familiales, des attentes pesantes, des regards de Positano, la route devient un espace infini. Le monde derrière nous s’efface, emportant le fardeau des responsabilités. Ici, avec elle, la faida semble ne plus pouvoir nous atteindre, et je touche presque du doigt cette liberté que j’ai toujours cherchée.
La route s’étire devant nous, une bulle qui semble n’appartenir qu’à nous deux. Plus nous avançons, plus je me sens léger, comme si la Maserati nous emmenait vers une version de nous-mêmes intouchable. Je souris en voyant Giulia se détendre, sa main effleurant distraitement sa cuisse. Son corps, habitué à affronter les éléments, s’abandonne enfin à la douceur de l’instant.
— C’est quoi, ce fameux programme si bien préparé ?
Je souris, savourant le suspense.
— Je te répondrai… mais à une condition.
Elle arque un sourcil, croisant ses jambes avec une grâce espiègle, cherchant mon regard.
— Laquelle ?
— Dis-m’en plus à propos de la photo des dessous que tu m’as envoyée.
Elle me lance un regard coquin, ses yeux pétillant de malice.
— Je ne parlerai que sous la torture, Gianni.
Je ris doucement, déjà pris dans ce jeu de séduction. Le sentiment de liberté grandit à chaque kilomètre, à chaque échange complice. Avec elle, tout devient plus léger.
— Je me consacrerai à te torturer aussi longtemps qu’il le faudra.
Elle finit par céder, non sans jouer encore un peu.
— Tout ce que je peux dire, c’est que je ne pourrai peut-être pas reproduire cette photo aujourd’hui…
Un instant, je suis déstabilisé, mon esprit s’emballe. Mon regard glisse vers elle, et ma main quitte le volant pour effleurer sa cuisse.
— Attends… Tu veux dire que… ?
Elle éclate d’un rire audacieux en voyant mon expression.
— J’ai dit « sous la torture », Gianni.
Giulia
Le léger claquement de la portière brise à peine le calme paisible d’Atrani. Mes doigts glissent sur la poignée en métal froid, encore engourdis par le long trajet. L’odeur subtile de cuir neuf flotte dans l’air, mais c’est le contact des pavés sous mes sandales qui me ramène à la réalité. Enfin, mes pieds touchent terre après le bercement de la Maserati tout au long du voyage.
Je me redresse, ajuste mes lunettes de soleil, et mes yeux se posent sur les maisons blanches accrochées aux collines, semblables à des perles suspendues. Ici, tout semble figé dans le temps, entre ciel et mer, loin du poids de Positano. Chaque ruelle, chaque maison endormie sous la lumière douce du matin raconte une histoire, mais ici, tout paraît plus léger, presque magique.
On emprunte un sentier qui serpente entre les bougainvilliers éclatants et les oliviers noueux. À chaque pas, le parfum des fleurs se mêle à celui de la mer, et je sens mes épaules se détendre. Positano et ses querelles s’effacent dans l’air frais. Ici, il n’y a que nous, et ce lieu qui semble hors du temps.
La villa, perchée sur la colline, est un véritable bijou d’Atrani. Ses murs blancs immaculés, ponctués de pierres apparentes, captent la lumière du matin, tandis que des bougainvilliers éclatants encadrent les fenêtres. Immenses baies vitrées, ouvertes sur la mer, laissent entrer la brise marine, remplissant l’intérieur de fraîcheur.
La terrasse en marbre s’étend largement, bordée par une pergola élégante où des voiles légers ondulent doucement. En contrebas, un escalier mène à une plage privée, cachée entre des falaises, avec du sable doré baigné par une eau turquoise. L’endroit est parfait, et l’espace d’un instant, je me demande si je rêve.
Je lance un regard à Gianni, cachant ma surprise.
— Sérieusement ? Encore un de tes amis à qui tu rends service ? Il doit vraiment te devoir une belle faveur.
Gianni sourit, arborant son habituel air énigmatique.
— En réalité, c’est moi qui lui dois un service maintenant. Mais c’est une longue histoire.
Je ris légèrement, une chaleur douce m’envahissant. Nous montons sur la terrasse, et face à l’immensité de la mer, tout semble s’apaiser.
L’intérieur allie modernité et charme local. Le salon spacieux, avec ses canapés confortables, offre une vue imprenable sur la baie. Gianni attrape un fruit dans la corbeille sur la table et me le tend. Nos doigts se frôlent à peine, mais je ressens une tension qui dépasse ce simple geste.
Je croque dans la figue, surprise par sa saveur. Les arômes éclatent en bouche, intenses, comme si tout ici avait une énergie particulière.
— Elle est douce et sauvage… incroyable.
Je la tends à Gianni. Il croque à son tour, un sourire complice se dessine.
— Et vraiment juteuse.
Je le fixe, troublée.
— C’est quoi le secret de cet endroit ? Tout ici est plus… vivant.
Gianni me fixe, son regard brûlant. Il effleure ma joue, repoussant une mèche emportée par le vent. Ce simple contact fait naître un frisson le long de ma colonne vertébrale.
Mon cœur s’emballe lorsqu’il murmure :
— Peut-être que tout est meilleur en bonne compagnie…
Nos regards se croisent, et dans cet échange silencieux, je sens quelque chose grandir, quelque chose de plus profond. Une promesse tacite, un moment volé au monde. Je baisse la tête un instant, tentant de contrôler mes émotions.
— T’es sûr que tu ne dis pas ça à toutes les filles que tu emmènes dans des villas de rêve ?
Je plaisante pour masquer la rougeur qui monte à mes joues. Gianni prend ma main, son regard devient espiègle, irrésistible. Avec cette ironie tranquille qui le caractérise, il réplique :
— Non, avec toi, c’est différent. Je suis clean depuis un moment… J’ai complètement décroché des instagrameuses. J’y touche plus.
Je souris, amusée :
— Ah oui ? Pas trop dur, le sevrage ? T’es sûr qu’il n’y a pas un risque de rechute ?
Son sourire s’adoucit, une lueur sincère passe dans ses yeux. Il secoue la tête, satisfait, avant de murmurer :
— Non, aucun risque depuis que je t’ai croisée.
Ses mots me touchent plus que je ne l’aurais cru. Il est sincère, et ça me frappe de plein fouet. Je le regarde un instant avant de répondre, toujours espiègle :
— Alors, je suis ton nouveau vice ?
Un sourire malicieux se dessine sur son visage, mais il ne détourne pas le regard.
— Tu l’es, oui… et je n’ai pas du tout l’intention d’arrêter.
Je le fixe, surprise par la profondeur de ses mots. Ce n’est pas juste un simple week-end qui nous tend les bras. C’est un moment à nous, loin de tout. Le soleil illumine la mer, mais je ne peux détacher mes yeux de Gianni. Il fixe l’horizon, pensif, puis murmure :
— Je me demande parfois ce que ça ferait… de pouvoir marcher ici dans la rue avec toi, sans cacher ma nouvelle addiction. Sans traîner derrière nous le poids de la faida.
Je serre sa main plus fort, touchée par cette vulnérabilité qu’il montre si rarement. Ses mots m’atteignent en plein cœur. Ce besoin de liberté, de vivre sans porter le fardeau de querelles qui ne nous appartiennent pas.
Je me redresse, un sourire aux lèvres.
— Je pense que c’est une demande honnête, Gianni. Et tu sais quoi ? Il est temps d’y remédier… maintenant.
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